Numéro d'édition: 2115
Lettre de Félicien Rops à [Léon Dommartin]
Texte copié

Expéditeur
Félicien Rops
1833/07/07 - 1898/08/23
Destinataire
Léon Dommartin
1839/09/11 - 1919/08/23
Lieu de rédaction
s.l.
Type de document
Lettre
N° d'inventaire
II/6714/9
Collationnage
Autographe
Lieu de conservation
Belgique, Bruxelles, Bibliothèque royale de Belgique, Cabinet des Manuscrits
Page 1 Recto : 1
Mon Vieux,
Comme tu le dis, il faudrait un fort volume pour expliquer ton cas. Quant à la douche d’eau froide que tu prétends avoir reçu de MlleBonvalot tu me fais l’effet d’être fort sensible de ce côté, – je lui ai parlé de cela, elle a voulu me prendre, malgré moi, pour arbitre & ma lu une des lettres qu’elle t’a envoyées et j’avoue qu’elle m’a paru d’un extrême bon sens & d’une raison parfaite. Comme je te le dis tu es, – comme tous les êtres personnels, – très sensible aux douches que tu reçois, mais fort insensible aux douches que tu donnes. J’ai été témoin de celle que recevait Marie Bonvalot à Montlignon, et j’avoue qu’à sa place, devant non seulement ton manque de galanterie, mais même de politesse élémentaire, j’aurais prié mon aimable fiancé de « prendre sa canne » !! On n’affecte pas plus complètement l’absence d’attention & de prévenances vis à vis d’une femme que tu l’as fait pendant deux ou trois jours. Cela en était grotesque & Léontine en était justement indignée. On eut dit que dès ce jour tu cherchais une rupture qui devait être déja dans ton esprit. Sans cela cette conduite simplement grossière & niaise & sans raison d’être !
Tu devais écrire au père Bonvalot
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de ton cas et tous les dix te donneraient tort ! – S’il y a eu douche, c’est bien dans la lettre que tu as écrite à Marie Bonvalot ! Mais un homme de 90 ans prenant une gouvernante & lui expliquant son cas n’écrirait pas autrement ! C’est la manifestation d’un égoïsme, dont tu ne me fais pas du tout l’effet – à toi qui trouve que ton cas est simple, – d’avoir conscience ! – Jamais je te le dis une femme jeune n’acceptera ces préliminaires glacés, sans protester, ou alors c’est une fille qui veut faire « une affaire ». Et comme il n’y a pas d’affaire « à faire pour MlleBonvalot dans ton mariage
Clairette est à Douvres. C’est toujours bien beau Douvres !!! – De Lalouvière je vais à Middelkerke avec toi & à Douvres. Veux-tu venir à Douvres par Anvers ? (J’oubliais que le bateau va d’Anvers à Harwich !) Enfin nous causerons de cela !
À Lundi soir, je te télégraphierai, ou je t’écrirai. C’est Mll Boch qui m’écrit de prendre le train de 12-35 Mardi. Naturellement tu le prends avec moi. Bonnes amitiés à ta
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mignonne fille & bien à toi
Fély,
– Somme toute : Tu reconnais comme moi l’arrivée de la « Dona clauda pese » & comme un derviche tu te mets sur le dos, & tu attends qu’elle t’écrase ! moi elle m’a passé une fois ou deux sur le corps par ma faute & maintenant, je bâtis mon logis sur un monticule qu’elle grimpera difficilement !! – Seulement le logis ne se bâtit pas tout seul ! Il faut quelqu’énergie & avoir une femme énergique à ses cotés.
Marie Bonvalot était peut être la seule femme qui par son exemple aurait pu donner quelque vaillance à Émilie, & à toi le courage de produire des choses d’une certaine valeur & d’être heureux. – Car on est heureux que lors que l’on fait ce que l’on devait faire dans la Vie ! & l’on ne sort pas de là . Voilà le résumé & le dernier mot de la dernière lettre que je t’écris sur ta situation morale & physique.
Or à moins d’être un second Stocquard & même moins que lui, je ne crois pas que tu étais destiné à ne faire que des articles dans la Chronique & a dessiner des campaniles sur un calepin !!!
Si tu trouves que tu n’as que cela dans la tête & dans le ventre & dans les mains :
Tu as raison de vivre comme tu vis !! Voilà tout
Détails
Support
1 feuillets, 4 pages, Vergé, Crème.
Mise en page
Écrite en Plume Noir.
Copyright
KBR