Numéro d'édition: 2730
Lettre de Félicien Rops à [Léon Dommartin]
Texte copié

Expéditeur
Félicien Rops
1833/07/07 - 1898/08/23
Destinataire
Léon Dommartin
1839/09/11 - 1919/08/23
Lieu de rédaction
s.l.
Date
1883/10/31
Commentaire de datation
Datation sur base de l'apostille.Type de document
Lettre
N° d'inventaire
II/6655/468/150
Collationnage
Autographe
Date de fin
1883/10/31
Lieu de conservation
Belgique, Bruxelles, Bibliothèque royale de Belgique, Cabinet des Manuscrits
Apostille
1883?
Aucune image
Page 1 Recto : 1
31 oct.
Mon Cher Vieux
Je t’écris ce mot ci pour te dire 1° que je vis toujours. 2° pour t’envoyer ma nouvelle adresse à partir du premier janvier 1884 : 21 Rue de Grammont. –
Pour te prouver que je t’aime beaucoup – quand même, je t’envoie la lettre que je t’écrivais il y a un grand mois. – Il vaut mieux & toujours se dire ce que l’on a à se dire, la parole corrige la dureté du verbe, & le ton fait la chanson. – Je ne veux pas me brouiller avec toi, quoique tu le mérites bien depuis deux ans ; mais je crois qu’en amitié celui qui donne le plus est encore celui qui en tire le plus de joie.
J’ai été très heureux d’apprendre que la santé d’Émilie était rétablie. Tu sais combien j’aime ta fille & comme je l’ai toujours défendue contre la méchanceté bourgeoise de là bas, et quand tu n’étais pas là. Embrasse la pour moi.
Clairette passe l’hiver à Paris ; en mars elle retourne à Douvres.
Je fais moi-même son éducation. Léontine & toute la maisonnée s’installent
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le 1er janvier 1884 au N°19 de la rue de Grammont. Moi au 21 comme je te l’ai dit, les maisons communiquent – j’ai là un petit atelier, un peu plus petit que celui du 17 de la rue Drouot, mais fort aimable, ce sera parfait pour le travail. Tout cela coûte 12,000 frs de loyer ; il va falloir donner un fort coup de collier ! Mais « le coup de collier est devenu inséparable de ma vie & je ne la comprends plus sans cela. Je devenu tellement parisien, si imprégné de cet atmosphère de mouvement, de travail fou, de pensées crânes & neuves, où les nerfs chantent & dansent que c’est une joie, pour moi, de voir devant moi le « devoir faire » se dresser. J’ai abattu cette année un travail fou & je n’ai pas encore assez travaillé ! Uzanne va je crois diriger un immense « Magazine ». – Tout cela n’empêche pas de faire de belles études des feuilles jaunes d’octobre. On arrive à avoir cent bras & cinquante têtes comme Briarée, fils du Ciel & de la Terre comme les vrais artistes. Tu verras les belles choses que j’ai faites ! Je commence maintenant pour Londres le livre des Paraboles : Le Semeur est déja paru là bas. Car il faut te dire que j’ai été sept fois à Londres cette année. J’en reviens & j’y retourne le 10 Novembre. – Les amies Léontine & Auré feront evidemment de grandes affaires dans ce nouveau coin. – L’appartement du 19 de la rue de Grammont est superbe, le salon peint par Paillet l’élève de Boucher avec les boiseries du temps, a un caractère « œil de bœuf » à croire que Mme d’Épinay bavarde dans la chambre à coté & dispute avec les beaux esprits. – Es-tu venu encore à Paris depuis quelque temps ?
Bref voilà tout. Liesse invisible absolument. Pas vu depuis mars !! Rien pas signe de vie. Encore quelque chose : Comment donc s’appelle « notre ami » qui a reédifié l’abbaye de Villers ? sur plans, bien entendu ??
On m’a dit qu’en Belgique on disait que j’étais devenu fou ? Délicieuse patrie ! As-tu entendu parler de cela ? –
La Germinie Lacerteux » illustrée par F. Rops paraît en mars 1884. Tout est fait.
Les Sonnets du Docteur de Camuset / dessins de Rops / paraissent en mars Tout est fait.
Le Vice suprême de Joséphin Péladan chez Lemerre en mai. J’y travaille. C’est fantastique d’étrangeté les dessins de cela !
Les Sataniques sont parues. 500 frs les six planches. –
Et voilà ce que Paris a fait de cet indolent de Rops. Aussi tu voudrais me faire nommer roi des Belges que je t’enverrais au diable, la place place royale ne me plaît pas ! À part cela, quand on veut, on est heureux sous un
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toit de chaume dit Mr Prudhomme !
À toi vieux de ma vieille amitié
Fély
N’oublie pas : adresse & nom de notre ami l’architecte de Villers & l’adresse de F. Taelemans si tu peux la trouver. Cela presse.
À toi.
Fély
Et ne te disculpes pas ! Tu a tort ! – N’aggrave pas tes fautes. Du reste cela m’est égal puisque je vois combien la Belgique a gonflé tes défauts sans souffler dans tes qualités. Je lis la Chronique pour ta punition. Cochon !!! Et je la lis tous les jours, – aux lieux – je ne collectionne pas.
Bonnes amitiés à ta mère.
Détails
Support
1 feuillets, 4 pages, Vergé, Crème.
Mise en page
Écrite en Plume Noir.
Copyright
KBR