Numéro d'édition: 2729
Lettre de Félicien Rops à [Léon Dommartin]
Texte copié

Expéditeur
Félicien Rops
1833/07/07 - 1898/08/23
Destinataire
Léon Dommartin
1839/09/11 - 1919/08/23
Lieu de rédaction
Bièvres, Les Jolinets
Date
1883/07/15
Type de document
Lettre
N° d'inventaire
II/6655/468/149
Collationnage
Autographe
Date de fin
1883/07/15
Lieu de conservation
Belgique, Bruxelles, Bibliothèque royale de Belgique, Cabinet des Manuscrits
Aucune image
Page 1 Recto : 1
Les Jolisnets.
Bièvres, 15 juillet 1883.
Mon Vieux,
Je t’espérais vaguement au 14 juillet. Je me disais que la Chronique devait avoir besoin de renseignements précis sur les érections du programme, & ne pouvait faire mieux que de t’envoyer la bàs, – ici. –
Moi, je suis en fort travail & je resterai ici le mois d’Aout, parce que j’exècre l’envahissement bourgeois des villes d’eaux au mois d’Aout, puis aussi parce que Léontine quittant la rue Richelieu le premier janvier 1884 & voulant s’installer beaucoup plus luxueusement dans « un premier » quelconque, & avec sa crânerie ordinaire comptant donner à sa nouvelle maison l’importance d’une maison de premier ordre, il est de mon devoir de faire tout mon possible pour lui donner un fort coup de main dans l’affaire. Du reste tu sais que j’aime « les charges » ! Paris m’a donné le besoin de la lutte qui somme toute est la vie & la vraie. – Léon a sous la main une chose superbe, pour une maison
Page 1 Verso : 2
specialement artistique comme elle en rêve une. Elle a trouvé délabrés, abandonnés par le Crédit Lyonnais qui a acquis presque tout le pâté de maisons qui l’entoure, les vieux salons de l’ancien hôtel des Lavalette rue de Grammont ! C’est superbe. Les boiseries et les peintures du temps ornent encore le grand Salon, & cela a tout a fait grand air. Mais le Crédit Lyonnais en demande quinze mille francs de loyer !! Léon en offre douze mille. C’est raide ! Mais tu sais qu’elle ne doute de rien & que jusqu’ici cela lui a réussi. Il faut tout dire, cela lui a réussi parce que c’était doublé de goût, d’intelligence & surtout de travail. Si elle fait cette affaire elle est d’emblée rangée parmi les 1ères maisons, mais il faudra donner un rude coup de chien !! – Il y a vingt cinq mille frs de frais généraux ! Mais elle croit en son étoile, de sorte que je crois bien aussi qu’au 1er janvier 1884 nous serons installés au N° 19 de la rue de Grammont. Que le sort la favorise car elle le mérite fort & si la fortune lui arrive elle l’aura bien gagnée,. – moi seul peut savoir ce que Léontine & Auré ont travaillé depuis quinze ans. – – Tes oreilles ont du tinter avant-hier car on a beaucoup parlé de toi au dîner des Hongrois. J’étais à côté de Jehan Walter qui m’a parlé de toi, de Virton, de Florenville. Encore un qui se demande comment tu es resté collé la bàs & qui espère aussi te revoir ici & vite. – Donc ne pouvant aller en Juillet à Heyst ou autre part, j’irai à la
Page 1 Verso : 3
mer en Septembre nous ferons cela ensemble comme c’est convenu. Tiens-moi au courant de tout ce que tu comptes faire.
Clairette arrive de Douvres pour ses vacances. Elle m’accompagnera. Elle embrasse Émilie en attendant.
Ta lettre est pleine de choses justes à propos de Mlle Bonvalot & de choses folles. – Les paroles que je te citais d’elle, te prouvent qu’elle ne te connaissais pas. Parbleu ! elle te connaissait d’après ce que tu lui avais laissé connaître. On ne juge pas de la lune d’après un quartier. Puis vois-tu les femmes vraiment femmes c’est à dire travailleuses & intelligentes faites pour être des mères & des épouses ne comprendront jamais nos rêvasseries philosophiques. – Heureusement elles n’ont pas été à l’Université d’Oxford, & nos vues « d’ensemble » sur les choses leur échappent. On peut arriver à leur faire partager & nos idées & notre vie, parce que le dévouement est leur essence & qu’elles comprennent tout ce qu’on leur explique bien. Mais vouloir qu’elles vous devinent c’est de l’insanité. C’est en dehors de l’esprit francais & gallo-romain ! – Une slave ferait mieux, mais elle ne t’apporterait pas ce que t’apporte la gallo-romaine, la bonne gaieté de sa race & le cœur français ; puis ce je ne sais quoi qui fait que lorsqu’on a aimé une française on n’aime plus autre chose.
À bientôt Vieux & bien à toi
Embrasse ta fillotte pour moi.
Fély
Page 1 Recto : 4
P.S. Uzanne de retour comme je te l’ai dit. Enfoncé dans son livre de nouvel an jusqu’’au nez. J’ai fait pour cela quatre dessins. Je ne trouve pas les procédés employés par lui suffisants é c’est matière à disputes ! Comme il est embêté comme un sec de charrue, il va tout de même, mais je crois que la fin me donnera raison, malheureusement.
– Liesse ? – pas signe de vie du tout. Étrange ! puis La maison Charpentier est sur son cul, c’est marpon qui a dit : La maison est à moi c’est a vous d’en sortir ! Sans Tartufferie d’ailleurs. Charpentier reste employé & la firme reste encore pendant quelques années m’a-t-on dit. N’importe la grande ombre rêche du père Charpentier doit être bien vengée.
C’est trop bête d’avoir gaté cette boutique là, pour faire plaisir à Zola. Mais j’aurais inventé de nouveaux poêtes grecs & Latins. et j’aurais exhumé une demi-douzaine « « d’ausone » de rencontre plutôt !
– C’est un bon garçon, Charpente jeune, mais quand on une cervelle de brême au court bouillon, on se retire à la campagne au début de sa carrière & on reste dans sa chaise à faire des risettes au soleil. F
Détails
Support
1 feuillets, 4 pages, Vergé, Crème.
Mise en page
Écrite en Plume Noir.
Copyright
KBR