Lettre de Félicien Rops à [Léon Dommartin]

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Reçu ta bonne lettre, je pars Samedi matin. pour le Havre

La Bretagne démarre à 1 h. – à deux heures nous serons en pleine mer. Je reviens de l’ambassade avec mon passeport. La Traversée pourra être bonne, l’équinoxe passe, & si nous n’avons pas trop de brouillards au banc de Terre-Neuve nous pourrons bien arriver. C’est encore à Terre Neuve que le dernier bateau « américain » de la compagnie Wasth a été perdu, coupé évidemment par un vapeur russe qui n’en a pas soufflé mot. On n’a appris la chose qu’un an après. Nous sommes quinze cents personnes à bord ! La population de Gembloux. Seize cents francs aller & retour pour moi & ma femme – qui va faire des affaires là bas & qui profite de l’occasion, – c’est raide ! Aussi a-t-il fallu trimer !!! Que veux-tu c’est une

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chance que nous courrons. Au départ on ne peut s’empêcher d’une certaine émotion en quittant tous ceux qu’on laisse & qu’on aime. Mais j’ai un tempérament qui à mesure qui à mesure qu’il mûrit, s’accentue par des désirs de voyage, & par une activité artistique dont je ne me soupconnais pas les rudiments. L’Heure de l’Amérique est venue, & j’y vais, puisque l’occasion se présente. J’ai ta parole pour le « Strange America », & je la garde. Il y a bien des choses à faire ! Rien qu’en faisant traduire & en arrangeant un Guide français pour les États-Unis ! on gagnerait 10,000 francs. À chaque voyage des transatlantiques on en vendrait 300 me disait hier Levin le libraire.