Numéro d'édition: 2113
Lettre de Félicien Rops à [Léon Dommartin]
Texte copié

Expéditeur
Félicien Rops
1833/07/07 - 1898/08/23
Destinataire
Léon Dommartin
1839/09/11 - 1919/08/23
Lieu de rédaction
s.l.
Type de document
Lettre
N° d'inventaire
II/6714/8
Collationnage
Autographe
Lieu de conservation
Belgique, Bruxelles, Bibliothèque royale de Belgique, Cabinet des Manuscrits
Page 1 Recto : 1
Mercredi –
Mon Cher Vieux
Tu es probablement rentré à Bruxelles de ta tournée en Namurois & païs d’Ardenne. Plus de nouvelles de toi ? Qu’a dit Popp & la famille de tes résolutions in extremis ? – Comme je te l’ai dit, la raison de non pension est à mes yeux la seule sérieuse. Je crois que tu as à côté de cela exagéré les ennuis bourgeois dont tu me parles. Tu emportais ta femme à Paris & quand le diable y eut été, elle était toi & elle loin de toute influence, & à l’abri de tout embêtement. Je trouve que tu es assez cocasse, vrai. Tu as l’extrême & rare chance d’être aimé par une belle fille jeune, à un âge où cela n’arrive plus guère, & tu renifles avec un peu bien de la désinvolture, m’est avis ; – car la question d’argent ne me paraît pas être la seule en jeu, & tu me sembles bien être « tombé » sous le coup des arguments d’Edmond – qui n’a jamais vu très clair ni pour lui ni pour les autres en ces matières. Car tu seras de mon côté en ceci : qu’il n’est pas bien sûr que tu trouves l’équivalent de ce que tu lâches. Il ne faut pas nous flatter, Mon Vieux, nous le sommes, « vieux » tu parais fortement ton âge, qui est de ceux qu’on n’aime pas à avouer aux jeunes dames
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même après boire. Edmond est relativement jeune & en parle à son aise ! Quand on à passé ce cap des Non-Tempêtes qui s’appelle la quarantaine, on devient difficile à caser ! – – Bref, en cette affaire je crois que s’il y avait beaucoup d’arguments contre, il y avait beaucoup d’arguments pour, – bien entendu, si tu as cédé à d’autres raisons qu’à la raison de « sols ». Voilà mon avis suivant ma petite jugeotte & il est juste je crois.
– Si tu veux penser sérieusement à la petite Bonvallot, il faudra tâcher de t’en faire aimer, & je t’engage à ne pas trop tarder, & cela ne sera peut être pas d’une entière facilité. – Tu dois te marier, car avec ton caractère si ta mère n’était plus là, tu geindrais, & tu aurais la solitude en horreur ; tu as besoin d’un intérieur & d’un intérieur orné « jeunement » sans cela tu seras le plus malheureux des fabricants de lettres. – Tu avais trouvé une jolie chose, il faudra maintenant voir ailleurs, ici de préférence, mais ne tarde pas trop ; il n’est que temps. – Songe au héron !!!!! À te voir te promener dans l’existence, on croirait que tu as dix-huit printemps & des jolies pucelles dans toutes tes poches ! – Viens en mai, à Paris nous ferons avec la petite Marie une promenade extra-muros, tu verras ce qui en est & si cela ne te convient pas ou si cela ne lui convient pas, ce qui pourrait être, tu mettras le cap sur d’autres terres.
Les Godebsky sont de retour, ils sont installés dans leur hôtel au parc Monceaux, deux chevaux voitures etc etc. Et dire que cet animal d’Edmond a boudé devant cela & n’a pas vu « clair ». – En voilà un rateur de mariages ! La petite a son million de dot & Edmond plaisait à la mère ! & la petite, note bien, est charmante. Edmond est un joli myope. –Tu m’as fichu dedans avec l’affaire Sembach, – l’affaire se poursuit & elle pouvait être arrêtée quand je t’ai écrit. Voilà comment Sembach & son huissier « ont bu une choppe ensemble ». Cela me donne un tas d’embêtements & d’avocasseries, que tu pouvais au début, m’éviter en examinant l’affaire plus sérieusement, & elle en valait la peine.
– J’ai longuement parlé de toi, hier, avec Uzanne, nous avons diné ensemble. Il a je le crois l’intention de t’offrir une place au Livre, – une quinzaine d’heures de travail par semaine, suffisamment payé, & à un moment donné tu le remplacerais entièrement si tu faisais l’affaire. – C’est dans tes gouts, le Livre est une revue bien posée & cela te laisserait ta liberté. – À moins que repris par les séductions de la Vie Belge, tu n’aies changé d’avis & que tu ne te décides à rester à Bruxelles en Brabant, – mais je n’en crois rien.
À toi Mon Vieux & à bientôt – Au galop !!
Fély
Amitiés de toute la maisonnée. Nous dînons tous avec Filleau chez Godebsky pour célébrer son groupe qui est très beau réellement.
Armand va parler à Mitchell. mais avant cela comme tu lui parais légèrement girouettique, il veut savoir si réellement tu viens en octobre à Paris afin de ne lui faire exécuter un pas de clerc.
Je t’enverrai demain l’état définitif de la Chandelle d’Arras, va chez Gay – 8. galerie du Roi lui demander la Messe de Gnide
Détails
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1 feuillets, 3 pages, Vergé, Crème.
Mise en page
Écrite en Plume Noir.
Copyright
KBR