Numéro d'édition: 3138
Lettre de Félicien Rops à [Maurice Bonvoisin]
Texte copié

Expéditeur
Félicien Rops
1833/07/07 - 1898/08/23

Destinataire
Maurice Bonvoisin
1849/05/26 - 1912/03/27
Lieu de rédaction
[Paris]
Date
1879/03/17
Commentaire de datation
Datation sur base de l'apostille.Type de document
Lettre
N° d'inventaire
Bon/LE/80
Collationnage
Scan
Date de fin
1879/03/17
Lieu de conservation
Belgique, Province de Namur, musée Félicien Rops
Apostille
Paris, 17 mars 79
Page 1 Recto : 1
Mon Cher Maurice
Il était bien inutile de renvoyer le dessin à Taelemans la lettre de Taelemans que je t’ai expédié me paraissait assez explicite & nette, & je ne voyais plus le besoin de « talonner » ton amateur » !! Du reste je crois que « talonné ou non » le résultat eut été le même. Je n’ai jamais rencontré d’amateur qui ait besoin d’une quarantaine pour prendre un tableau & de méditer longuement vis à vis d’une toile pour savoir si elle fait oui ou non son affaire. À Paris comme partout les marchands de tableaux ne vous laissent jamais un tableau, pas plus que les artistes. On prend ou on ne prend pas & tout cela est l’affaire d’une demi-heure de réflexion, voilà tout. Cela se fait ainsi dans toutes les parties du monde.
Tes explications n’expliquent rien mon bon Maurice, ‒ et je t’assure
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que si tu étais un autre & si je ne te devais pas d’argent, ce qui ne rend pas trop facile le payement de ce tableau, je te considererais tout a fait comme l’acquéreur du tableau. Parce qu’aucune explication ne change les choses absolues : ‒ Ta lettre avant l’envoi par laquelle tu me promets & tu t’engages à renvoyer le tableau à Taelemans immédiatement puisque tu savais qu’il avait un amateur pressé, & en réponse à la mienne. ‒ Note en outre que tes scrupules de pudeur te sont tard venus puisque je t’avais envoyé un croquis très exact de la chose avec détails & explications. Si tu m’avais répondu : les convenances m’empêchent de prendre une nudité & des volets ne cachent rien (!) je n’eusse pas envoyer de nudité ! Mais tu m’écris : « je ne peux me décider qu’après avoir vu » ; donc il n’y avait que l’exécution qui te faisais hésiter et tu la déclares excellente. ‒ ? ‒ ? ‒ Enfin tu renvoies – quinze jours après le tableau à Taelemans, qui n’en a plus que faire. Je connais son amateur, on lui a manqué, c’est un homme très influent, le premier amateur d’art peut être de Bruxelles, & il n’y a pas à songer à lui reparler de cela. À moins que Taelemans ne craigne pas de se faire flanquer à la porte par le valet de chambre. Et comment va arriver ce tableau très délicat & dont le procédé est très antipathique aux bousculades des chemins de fer ?? ‒ J’écris à Taelemans de le faire expédier à Bonnefoy, je le retoucherai à Bruxelles s’il est endommagé, car tout cela ne doit pas lui avoir fait du bien& je le garderai pour moi, car je ne veux pas le vendre le prix que je t’avais offert, & il y a peu d’amateurs de grandes nudités à Bruxelles. ‒ Maintenant quant à notre compte, tu tireras sur moi à trois mois pour 312 frs (il est juste que tu prennes ta part de mes déboires dans lesquels tu as trempé). Quand j’irai à Bruxelles, je te porterai le Scandale, tu le verras, il y a encore deux figures à finir, je les finirai la bàs dans une quinzaine de jours j’y serai. Je suis très pressé d’argent dans ce moment, je dois payer le 20 de ce mois trois ans de loyer d’avance pour l’atelier que je viens de faire bâtir 13 Rue Labie porte Maillot
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(Prends cette adresse, je serai à la fin du mois à la porte Maillot), je suis forcé de faire feu des quatre pieds, 3,300 francs à payer d’emblée c’est assez rapide. ‒ Voilà tout Mon Cher Maurice, je que je regrette le plus là dedans, c’est non pas la non vente de ce dessin cela n’a pas d’importance mais de m’être fermé à Bruxelles une collection dans laquelle je voulais entrer, et le bonhomme est rancunier en diable. ‒ Quant à ton amateur est ce comme sujet qu’il a refusé le tableau ou simplement parce que cela ne lui plaisait pas ? ‒ Mais s’il demandait à Paris deux peintres de lui laisser un tableau huit jours on lui rirait au nez ou on lui ferait payer la location ! Les tableaux aux vitrines ont le public ce qui est une compensation ‒ & ‒ en dehors des mauvais – appartiennent tous à des marchands ou à des amateurs, on comprends qu’ils séjournent une huitaine de jours dans des locaux où passent tous les curieux de Paris.
À toi & à bientôt.
Fély
Détails
Support
1 feuillets, 4 pages, Vergé, Crème.
Mise en page
Écrite en Plume Noir.
Copyright
Photographie Vincent Everarts