Lettre de Félicien Rops à [Léon Dommartin]

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J’ai un tas de services à « te raconter » & à te demander. Ne t’effrayes pas cela n’est ni lourd ni difficile & je ne te demande pas d’argent ! Sois calme & souriant :

1er Service.

Je te demande, sans espoir de refus & sans possibilité d’en essuyer, de planter la Chronique là, pour un jour : le 18 Novembre : Samedi prochain, dans huit jours à Givet et de me donner un pas de conduite jusqu’à Givet. Voici pourquoi : Non seulement j’aurai le plaisir de jouir jusqu’à la frontière du doux pays de France de ta somnolence matinale, mais tu connais Ménager ou Messager le commissaire de la gare de Givet, et par lui je pourrai éviter en partie la visite de la douane, sans cela avec la quantité d’objets biscornus, que je trimballe je n’en sortirai pas. Je pars par le premier train celui qui passe à Dinant à 8 heures ½ du matin. Je couche à Dinant pour ne le point manquer. Vous devriez faire une jolie partie : venir me conduire jusqu’à Monthermé, prendre par la Semoy et arriver à Anseremme par Gedinne & Beauraing. Prends ta carte-tecum, et regarde c’est simple comme un Siret. – Du reste tu ne peux refuser.

2e Service – (Demandé depuis un an !)

Prendre dans l’armoire – Siret préfère ormoire, – chez Lambriches rue de l’Association (je t’ai donné la clef de cette ormoire) tous les vêtements qui s’y trouvent les fourrer dans un « bodet » que tu iras acheter de tes deniers en passant chez un vannier qui demeure Chaussée de Haect à une portée ½ de fusil de la rue Seutin, à gauche, lorsque l’on vient

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de la rue Seutin. – Au fait ne fais pas cette commission elle t’embêterait trop. Comme je reviens dans un mois en Décembre à Bruxelles, je ferai cela moi-même.

3e Service. Remettre à Paul le volume de Michelet, & lui dire qu’en Décembre j’irai l’embrasser. Très prudent si tu vois ma femme. Lui dire que je travaille, que j’ai été fort malade d’une inflammation des méninges partielle, très ennuyé à cause du retard Lemaire mais que je travaille & que je vis en honnête homme qui veut se réhabiliter & qui comprend ses fautes, rien autre chose Ajoute que tu me trouves très changé aussi bien moralement que physiquement.

4e Service Cela te concerne : Il faut absolument si tu veux garder ta popularité parmi les peintres que tu tombes l’article de Lagye qui a paru dans « la Gazette ». On reproche à la Chronique de ne faire que manger du curé & de ne pas osé attaquer un écrivain quelconque parce qu’il écrit dans un journal libéral & surtout dans la « Gazette ». Les Chrysalidiens m’ont envoyé un bout de lettre que je recopie et que je t’envoie, fais la paraître, ou fais en ce que tu voudras mais cite les extraits qui sont réellement fantastiques !!!!

On t’accuse de mollesse & c’est pour que « j’use » de mon d’influence d’ami sur toi que l’on m’envoie ce bout de lettre que je t’ai recopié parce qu’il y avait sur les marges de la lettre un tas d’observations à propos de mon eau-forte.

5e Service Réponds moi tout de suite.

Je n’ai pas fait venir les mignonnes de la rue Mosnier, & je crois que j’ai bien fait

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tu sais que nous en avions parlé & que tu étais de cet avis.

Engage Edmond à t’accompagner le 18. Tu reviendrais Lundi à Bruxelles & tu aurais vu, vous auriez vu une chose merveilleuse

Tu pars Vendredi soir tu viens coucher à Anseremme Lundi matin nous filons sur Givet, vous couchez à Membre (rien de viril) après avoir traversé Hautes Rivières & Bohan, à Membre vous prenez la route de Gedinne par Nafraiture & Houdremont vous traversez Beauraing & vous êtes Dimanche soir à Anseremme pour le diner. Fontaine vous accompagne. Moi je vous aurai quitté à Monthermé.

Je dois être le 20 à Paris absolument pour mes graveurs & mes tirages il ne faut pas blaguer c’est trop sérieux. En Décembre je serai à Bruxelles pour un mois.

Dans toutes nos petites affaires particulières, aussi bien tiennes que miennes se défier du bon Edmond qui raconte tout à tout le monde sans différence de sexe. C’est terrible mais il n’y a pas à le corriger. C’est inutile c’est inné.

Mon départ est irrévocable ! Je t’attends.