Lettre de Félicien Rops à [Armand Gouzien]

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Quant à l’histoire de Godebski voici Mon Cher Armand tout ce qui en est. Tu sais la fameuse histoire sur laquelle tout se base :Àla fondation des Aqua-fortistes Godebski m’a écrit pour faire nommer Membre Protecteur de la Société un Monsieur quelconque de St Petersbourg dont il me donnait le nom. – J’ai passé la lettre au Secrétaire de la Société, cette lettre ne demandaît pas de réponse, puisqu’il était convenu précédemment avec Cyprien que ce Mr était nommé « d’avance ». La guerre arrive : – Société remise aux calendes prussiennes ; – je n’avais donc pas à envoyer le moindre diplôme. – Depuis lors Godebski déblatère contre moi. J’en ris d’abord, tant que le petit débinage ne touche que ma personne & mon talent, dont je fais bon marché, & je prends cela pour une boutade d’ami nerveux. Mais pendant que nous étions à Paris avec ma femme, dernièrement ; il y a eu chez Mme Servais un grandissime dîner en l’honneur de je ne sais quels moines hongrois, la Godebski s’en est donné à cœur joie, & il s’est exprimé « sur mon caractère & mes mœurs » dans de tels termes que Frantz Servais & Jules Herman ont dû prendre énergiquement ma défense, & on lui a fait sentir qu’il était de la plus

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grande indélicatesse de s’en prendre à un absent auquel il donnait la main. Comme il y avait des artistes étrangers, entr’autres Carolus Durand & Lassen tu comprends le déplorable effet que ces attaques grossières & non justifiées peuvent faire. Plusieurs personnes m’en ont parlé & à un tel point que j’ai chargé Artan & Agneessens de demander à Godebski des explications catégoriques sur ses propos & sa conduite à mon égard. – Et j’attends ces explications & son retour. Voilà tout Cher Vieux ; tu vois que il n’y a pas de quoi fouetter un chat, mais je n’aime pas à me trouver vis à vis de personne dans une position douteuse. Voilà pourquoi malheureusement il est probable que je n’assisterai pas à l’inauguration de la Statue de Godebski – ce qui m’embêtera plus que lui ; pour vous d’abord & surtout, & un peu pour lui pour qui je n’ai jamais éprouvé que de la sympathie & de l’intérêt. –

Je n’ai pas encore reçu la lettre du ministre & je l’attends de jour en jour, j’espère être remplacé, & alors l’album marchera rude. Ah mon ami que c’est difficile de faire bien & grand, & quel horrible métier que le nôtre. C’est une lutte de tous les jours & comme Jacob avec l’ange on

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est toujours flanqué par terre. Je ne fais absolument rien depuis dix jours. J’ai déchiré & fichu au feu tout ce que j’avais fait. C’était bête, banal, veule ; Cela ressemblait à tout le monde à Bayard à Doré à Mr Machin. Le démon ne vient pas nom de Dieu ! C’est mauvais à foutre par la fenêtre tout ce que je fais & il faut que cela soit bon & fort ou je ne fais rien. – Que tout aille au diable plutôt que de faire mauvais.

Mais rassure-toi je me connais je suis désespéré parceque les choses que j’ai vues sont du domaine de Dante, & que je vais au delà des artistes à la grosse mais cela reviendra. & je vais m’y remettre.

Mais franchement ce que j’ai fait était bien mauvais. – Puis je rage, je m’impatiente je peste, & je fiche là tout après avoir déchiré les croquis, flanqué les pierres dans un coin & juré Mon salut.

Nom de Dieu que c’est difficile, & fatiguant : – Et cela viendra cependant !