Numéro d'édition: 3473
Lettre de Félicien Rops à [Octave Uzanne]
Texte copié

Expéditeur
Félicien Rops
1833/07/07 - 1898/08/23
Destinataire
Octave Uzanne
1851/09/14 - 1931/10/31
Lieu de rédaction
Paris
Date
1889/07/24
Type de document
Lettre
N° d'inventaire
CPEL/10
Date de fin
1889/07/24
Lieu de conservation
Collection privée
Aucune image
Page 1 Recto : 1
Paris 24 juillet 1889.
Mon Cher Octave,
on t’a attendu vainement pendant deux ou trois jours, puis nous nous sommes dit que tu étais probablement resté « à la mer », ce en quoi tu avais eu parfaitement raison. – Quiberville est un endroit quelconque, mais la mer n’est jamais « quelconque » & c’est toujours « l’alma mater » des gens qui comme nous, vivent trop par leurs nerfs & par leur cerveau. Paris devient de plus en plus un terrible caravansérail. La fête bat son plein, & deux heures du matin au boulevard offre un spectacle assez inoubliable. Nous avons eu Riban, le Riban de Tunis, après Pradelle. Puis des fêtes hongroises au Parc de St Cloud, avec des Hongroises de Szegéd qui nous tombaient dans les bras, comme là bas. Vraiment Paris, cette année est supportable. J’irai à la mer en Août, retrouver Godebski & Misia qui sont installés
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à Blankenberghe jusqu’au mois d’octobre. L’affaire de Middelkerke a raté comme tu le sais. Le Mr vendeur ne nous avait pas dit qu’il avait emprunté 25,000 frs sur deux maisons, & que le prêteur exigeait le remboursement immédiat de son prêt, en cas de vente. – Cela m’a ennuyé parce que tu connais mon goût pour les plages « à sable », – les seules où l’on se baigne agréablement avec « des tas de nymphes » comme disait le père Corot, même quand les nymphes sont des néréides !
Dom est resté en Ecosse pendant deux mois, voyage superbe à ce qu’il paraît d’après ses articles de la Chronique. – Émilie toujours en pension. Tout à fait extraordinaire cette espèce de prison imposée à une fille très majeure ; il faudra cependant que cela ait une fin quelconque !
Je ne fais pas grand’chose comme travail, cette Exposition vous mange tout, elle m’hypnotise. – L’Exposition Monet-Rodin : un succès. On a trouvé cependant que maître Rodin, – un « matois » comme Huysmans le dit, – en prenait bien à son aise avec le bon Félicien Rops, & que bien des croquis de ce dernier s’étaient mués en statuettes au Salon-Petit.
– Mon atelier de la place Boieldieu est charmant à habiter, gai, tranquille bon pour la rêverie & le travail. J’espère, – enfin ! – y faire qui vaille !
Pourquoi me félicites-tu de cette décoration ? – Entre nous cela n’est pas. Il fallait empêcher les gens de me prendre pour un fabricant de cartes transparentes. Ces méchancetés & ces sottises allaient atteindre ceux qui me sont chers ; il fallait une consécration officielle & bête à mon art pour les sots. Elle existe, – c’est tout. – À bientôt, mon vieil, on t’espère pour la fin du mois. Tu as eu raison d’aller prendre ce bain de lumière d’air & de soleil. Tu reviendras fortifié contre les ennuis & les labeurs d’ici.
Je t’envoie ma vieille & fraternelle accolade,
& les amitiés de tous
Ceux d’ici –
Fély
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