Lettre de Félicien Rops à [Félix Braquemond]

Page 1 Recto : 1

Je suis filé pour la Belgique avec une rapidité de banqueroutier sans même vous remercier et vous serrer la main, – c’est très mal mais c’était écrit. Je pars dans quelques jours pour Amsterdam avant d’aller voir la noire Angleterre. En attendant je me suis remis à aquaforter de tout cœur, j’ai essayé votre procédé-Braquemond dont les résultats m’avaient paru merveilleux : j’ai dessiné à la plume sur le cuivre nu – j’ai ensuite verni la planche et noirci ! puis je l’ai mis dans l’eau ; – voilà trois jours que ma planche se baigne comme un triton au fond d’un bassin d’eau pure et comme sœur Anne d’embêtée mémoire : je ne vois rien venir ; – j’ai beau la retirer tous les matins, le vernis est intact.

Faites-moi, je vous prie, Cher Maître, le plaisir de me dire si j’ai oublié quelque détail, et s’il faut faire autre chose

Page 1 Verso : 2

que :

1° Dessiner sur le cuivre nu avec une plume et avec de l’encre à écrire.

2° Vernir la planche

3° la noircir

4° la plonger dans l’eau pure des fontaines.

5° la retirer au bout de 24 heures, l’essuyer, et la regarder d’un œil avide et curieux.

J’attends : toujours comme cette embêtée sœur Anne et je vous demande pardon pour les scies présentes, passées et futures que je vous donne et que je vous donnerai, – mais Malassis m’a vanté votre gracieuseté – je ne sors pas de là, – voilà ce que rapportent les qualités morales et les amis dévoués.