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Jeudi 2 juin 1884
Chère Madame & Amie,
Je serai chez vous à trois heures ½ très precises, & je vous remercie de votre charmante gracieuseté.
Je ne pourrai, & je le regrette plus que je ne peux vous l’écrire avoir le plaisir de dîner avec vous, parce que mon vieux camarade Émile Hermant vient d’arriver & je l’ai invité à dîner au cabaret, comme des « revenus des pays d’outre-cœur ». Ah ! je voudrais bien en être revenu ! – Mais je ne pourrai jamais en sortir de ces pays là, & tous les matins je retrouve la déesse vêtue de tulle-illusion qui me dit : Ne nous quitte pas encore, tu as bien le temps, reste. Et je reste ! – Vous voyez bien qu’elle a raison, puisque j’aurai aujourdhui le bonheur de me promener avec vous, & que si j’avais donné ma démission d’homme, ce ne serait pas un bonheur, ce ne serait qu’un honneur.
Je vous baise les mains quoique vous n’en ayez que deux.
C’est bien peu !
J’y ajoute les pieds pour mieux Vous remercier, en regrettant bien de ne pouvoir rien ajouter aux deux pieds !!
Félicien Rops
P.S Je me rétracte ! je viens de voir Émile Hermant & je l’envoie se promener tout seul, j’aurai donc le plaisir de dîner en votre bonne & charmante compagnie.